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3. Propagande par le cinéma dans le bloc de l'Est

      Durant la Guerre Froide, le bloc de l’Est était constitué de l’URSS et tous les pays communistes d’Europe de l’Est ainsi que de la Chine et de Cuba. A la tête de ce bloc, un chef, Joseph Staline arrivé au pouvoir suite à Lénine en 1922 et qui créée, à cette même date, l’URSS, l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques, qui est un Etat fédéral constitué de 15 républiques soviétiques dont la Russie. Le cinéma, comme tous les autres arts, étaient censurés à l’époque et servaient au pouvoir comme moyen de propagande. Dès les années 1920, l’industrie du cinéma est nationalisée, c’est-à-dire que c’est l’Etat qui se charge de sa gestion. En 1919, une école de cinéma nationale, contrôlée par l’Etat est crée, ce qui lui permet d’avoir la main sur les œuvres créées au sein du pays.

De 1947 à 1953, période du stalinisme, la production cinématographique est entièrement contrôlée par l’Etat. C’est lui qui commande les films, leur sujet, leur nombre, qui décide le nombre de séances, etc…  Mais ces films n'étaient diffusés que dans le bloc de l'Est et censurés dans le bloc de l'Ouest. De la même manière, les films du bloc de l’Ouest étaient eux aussi censurés dans le bloc de l'Est. D’un petit nombre (19 en 1946, 61 en 1956), ces films ne témoignent pas directement de la Guerre Froide mais plutôt représentent une véritable arme idéologique, c’est-à-dire qu’on ne voit pas de combats directs entre les Etats-Unis et l’URSS directement mais on fait plutôt l’éloge des bienfaits du communisme et des méfaits du capitalisme.Deux types de films apparaissent donc : Les films pro-Staliniens et les films anti-capitalistes.

 

 

A. Les films pro-staliniens

 

      - Les films pro-staliniens et pro-communistes sont ceux où Staline est montré comme un dieu. C’est le « réalisme socialiste ». Créée en 1934, cette doctrine, élaborée par Joseph Staline et Andreï Jdanov, déclare que les artistes doivent mettre leur création au service « des objectifs du Parti Communiste » (PCUS) et « défendre l’esprit national ». Faisant de l’art un outil de propagande, les films créés selon cette doctrine sont totalement dédiés  au culte de la personnalité de Staline. Ils cherchent aussi et surtout à rivaliser avec le cinéma américain, multipliant les grandes fresques, glorifiant les Grands Hommes et la révolution d’octobre, la « grande guerre patriotique » (comme  La Chute de Berlin  de Tchiaoureli), ou le travail au champ. Le film  La Moisson  par exemple, de Poudovkine (1953) évoque le quotidien « idyllique » des kolkhozes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

    Le plus absurde dans ces séquences, idéalisant la vie des kolkhozes, c’est que Staline prenait cela pour la réalité. Dans un passage du rapport Krouchtchev (voir frise) on peut relever : « c’est à travers ces films qu’il connaissait la campagne et l’agriculture et ces films avaient beaucoup embelli la réalité. De nombreux films peignaient sous de telles couleurs la vie kolkhozienne que l’on pouvait voir des tables crouler sous le poids des dindes et des oies. Evidemment, Staline croyait qu’il en était effectivement ainsi. »

Mikhaïl Tchiaoureli est un réalisateur emblématique du cinéma stalinien de l’époque. Comme beaucoup de réalisateurs de l’époque, après avoir fait quelques films d’humour dénonçant implicitement le culte de la personnalité de Staline, il devient à partir de 1937 le réalisateur presque officiel de la propagande stalinienne. Avec plus d’une dizaine de films de propagande à son actif, Tchiaoureli se fait bannir des cinémathèques vers la fin de sa carrière, dans les années 1965. A travers la vidéo ci-dessous, nous avons essayé de donner quelques exemples de mise en image du culte de la personnalité de Staline. 

 

 

 

   

Le culte de la personnalité d'un chef d'Etat, ici Staline, est le fait de glorifier celui-ci, de le vénérer comme s'il était un dieu. Cela se traduit à travers l'admiration excessive envers celui-ci. Le culte de la personnalité est mis en oeuvre grâce à la propagande, les médias, les affiches, la litérature...

    Dans cette vidéo, vous pouvez voir des extraits du film Le Serment (Клятваde Mikhaïl Tchiaoureli et de La Chute de Berlin du même réalisateur. Il est important de dire que La Chute de Berlin a été tourné juste après l'échec du blocus de Berlin de juin 1948 à mai 1949. Ce film a donc été réalisé pour mettre en écho la prise de Berlin par les soviétiques lors de la Seconde Guerre Mondiale et le blocus de Berlin afin de cacher l'échec soviétique du blocus. C'est pourquoi dans ce film, ils sont montrés comme les sauveurs de l'Europe toute entière.

 B. Les films anti-capitalistes

    Tout comme le cinéma du bloc de l’Ouest, le cinéma du bloc de l’Est a  aussi créé des films de propagande montrant le capitalisme du bloc de l’Ouest comme l’ennemi du « bon » communisme du bloc de l’Est. Les « méchants » ne sont alors plus des agents du Kremlin, mais des agents du capitalisme américain. Dans le film Le Complot des condamnés de 1950 de Mikhaïl KALATOZOV, un complot entre le Vatican et la CIA est raconté, le complot visant à empêcher le « juste triomphe du communisme » en Europe. Des personnes d’Europe occidentale (finalement de la CIA) s’attaquent aux denrées alimentaires et tentent de faire accepter par le Parlement l’acceptation d’une aide selon le Plan Marshall. Mais heureusement, les bons travailleurs d’URSS les arrêtent et « la mère patrie » fournit alimentation et matières premières. Cette vision des ennemis de l’URSS dans ce film est très intéressante. En effet, les Américains, à la tête du bloc de l’Ouest, étaient l’ennemi désigné du bloc de l’Est et donc de l’URSS. Mais le Vatican ? Il se trouve en fait que, dès son arrivée au pouvoir, lors de la collectivisation des terres les églises furent dépouillés de tous les objets qu’elles contenaient. Les édifices religieux sont alors soit détruits soit transformés en bâtiments non-religieux. En mai 1932, il est prévu que sous 5 ans, il n’y aurait plus de religions en URSS. Mais la guerre oblige Staline à se rapprocher des orthodoxes qui lui apportèrent leur soutien et les quelques richesses qui leur restaient malgré la collectivisation. Mais, malgré cela, l’URSS reste profondément athée. En revanche, dans le bloc de l’Ouest, la religion chrétienne était très importante, et particulièrement la religion catholique dans les pays d’Europe de l’Ouest et le protestantisme aux Etats-Unis. Cette figure du Vatican dans Le Complot des condamnés constitue donc beaucoup plus qu’un simple ennemi mais plutôt un conflit idéologique ancré au plus profond des deux sociétés.

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